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La fresque,
"Manière de peindre
avec des couleurs détrempées dans l'eau de chaux, sur un enduit frais
(plâtre de chaux).
La fresque est la forme la plus parfaite de la peinture monumentale.
L'histoire ne nous donne ni l'époque, ni l'origine, ni même l'auteur qui, le
premier, a pratiqué l'art de la fresque. Mais son usage remonte fort loin
dans le passé : on en retrouve des vertiges dans les temples égyptiens. En
Italie, les fresques les plus remarquables ont été trouvées à Herculanum et
à Pompéi. Entre 1200 et 1600, la fresque prit un telle vogue que cet art
atteignit son apogée avec des peintres comme Giotto, Piero Della Francesca,
Michel-Ange, Raphaël, etc...
La peinture à la fresque est la peinture la plus durable. Sèche, elle
conserve indéfiniment ses teintes. Une fresque bien faite ne craint ni la
lumière, ni la poussière, ni les changements de température, et elle défie
les siècles.
Mes fresques sont le fruit d'études et de recherches afin d'obtenir la même
technique que les fresques anciennes, mais avec une praticité moderne, elles
sont transposées sur toile pour faciliter leur transport, enfin je laisse
une marge peinte en blanc autour de l'œuvre proprement dite, afin de donner
à celle-ci une meilleure sensation de "fresque murale".
B. TOPPI |
Mot d'accueil de
Claude Rochet
Au nom des membres de
Peintres en Champagne, je tiens à remercier la municipalité châlonnaise pour
le soutien constant qu’elle apporte à notre association et pour son accueil
dans cette galerie Clémangis. Merci également au public venu nombreux saluer
cette exposition présentant les fresques de Bernardino Toppi et marquant le
terme de notre calendrier 2009.
Enfin je vous transmets les excuses de Monsieur Benoit Apparu, Secrétaire
d'État chargé du logement et de l'urbanisme et Adjoint au Maire de Châlons
et de Monsieur De Courson, député de la Marne.
Bernardino Toppi est issu d'une famille d'artistes; une grande partie du
temps libre de son enfance se passa, guidé par un père peintre, à la visite
de Rome, sa ville natale et de la fabuleuse richesse artistique que l'on
sait et à Anticoli-Corrado, proche de la capitale, splendide lieu de ses
vacances, peuplé d’artistes de toutes nationalités. Il n'est pas étonnant de
le voir abandonner des études classiques et scientifiques pour souscrire à
l'appel irrésistible de la peinture.
C'est donc un jeune romain de 20 ans, déjà lauréat d'un prix en Italie, qui
s'installe à Paris en novembre 1959, voilà exactement 50 ans; c'est donc une
exposition doublée d'un anniversaire que nous célébrons ce soir!
Riche d'un remarquable parcours et de l'apprentissage, entre autres, de la
technique paternelle (et bien italienne) de la fresque murale, consistant,
je le cite, «à peindre avec des couleurs détrempées dans de l'eau de chaux,
sur un enduit frais», il parvient, au terme de ses recherches, à adapter cet
art millénaire à la peinture sur toile, devenant ainsi le créateur de la
fresque moderne.
Son talent est vite reconnu puisqu'il participe, dès 1960, au salon parisien
de la Jeune Peinture, marquant le point de départ d'une présence
ininterrompue dans les grands salons et les galeries de nombreux pays.
La technique particulière de ces fresques devenues tableaux et la
sensibilité de leur auteur confèrent aux œuvres, outre une résistance
exceptionnelle, une délicatesse, une évidente originalité, un style aisément
identifiable.
Le procédé demande une maîtrise et une rapidité permettant de travailler
dans le frais du support; cette difficulté, prix de la beauté et de la
pérennité de la fresque, fut saluée ainsi par Molière en 1669 :
«Cette belle peinture inconnue en ces lieux,
La fresque, dont la grâce, à l’autre préférée,
Se conserve un éclat d’éternelle durée,
Mais dont la promptitude et les brusques fiertés
Veulent un grand génie à toucher ses beautés!
…
Mais la fresque est pressante, et veut, sans complaisance,
Qu’un peintre s'accommode à son impatience,
…Avec elle, il n’est
point de retour à tenter,
Et tout au premier coup se doit exécuter» |
Pour l'anecdote, Molière louait le talent d'un champenois, Pierre Mignard,
justement né un 7 novembre, en 1612, auteur de la fresque de la coupole du
Val de Grâce; il avait 23 ans quand il se rendit à Rome pour apprendre les
procédés de la fresque; il fut surnommé «le romain».
Bernardino Toppi, que l'on ne
surnomme pas encore «le parisien», est indifférent aux modes et courants et
c'est tant mieux; les scènes paisibles de la vie quotidienne, les monuments
vénitiens ou les paysages servent de cadre à des scènes intemporelles,
oniriques ; l'harmonie des couleurs estompées, enfermées à jamais dans la
chaux et le sable confèrent aux œuvres une douceur et une pureté sans égales
et renforcent le sentiment de quiétude de ces moments d'humanité, avec ces
contrastes de la fugacité de l'instant, de la fragilité de l'humain, de ces
personnages sans ombre, avec la pérennité et l'inertie de la matière,
évoquant nos propres dualités.
Il n'y a pas de place pour l'anecdote; seule est conservée la représentation
d'un essentiel et son aspect furtif, laissant le spectateur à son imaginaire
et à une redécouverte permanente.
Malgré un succès qui n'a cessé de croître, l'homme a conservé une
simplicité, une modestie et une curiosité intactes. En introduction à
l'ouvrage qui lui est consacré, Bernardino Toppi réfléchit ainsi sur son
travail : « je voudrais arriver à un art plus allusif et discret, dépouillé
de tout superflu, où les formes s'effacent en laissant plus de place au
rêve. Mais je cherche aussi un côté magique et mystérieux, qui réponde à mon
besoin d'être fasciné par une œuvre qui émane d'une atmosphère spirituelle
et abolit la notion de temps et d'espace. »
Les nombreux témoignages devraient le rassurer; je citerai son ami et
biographe Gérard Silmo ici présent : « Toppi tire sa force de la discrétion
des nuances, du rapport harmonieux des valeurs tonales choisies et
magistralement distribuées... la technique de la fresque à ce point aboutie
devient magique ».
Cher Bernardino, l'art a trouvé en vous un digne successeur des fresquistes
de Pompeï; peut-être Sergio Leone en avait-il la prémonition en sortant son
film « les derniers jours de Pompeï » le 12 novembre 1959, pratiquement le
jour de votre départ de Rome pour Paris!
Savez vous que votre travail a déjà été présenté à Châlons? C'était en mars
1987, à l'occasion de l'exposition du Groupe 109 dans le Grand Salon de l'
Hôtel de Ville.
Enfin, autre rencontre avec le temps, le 29 octobre dernier, Asterix fêtait
ses 50 ans avec la parution d'une nouvelle BD. Non pas la dernière œuvre du
maestro italien du 9ème art, et homonyme Sergio Toppi, mais celle d'un
marnais descendant d'immigrés italiens, Albert Uderzo. Petite touche
supplémentaire du hasard, bien des chefs d'œuvre de la peinture y sont
joyeusement revisités!
Et bien je ne bouderai pas ce rare plaisir d'offrir Asterix à un romain,
fut-il parisien depuis un demi-siècle! N'y voyez pas l'image des luttes
entre Romains et Gaulois, mais celle de l'indispensable et fructueux échange
dont vous êtes le témoin.
Cher Bernardino, les membres
de Peintres en Champagne sont heureux et fiers de vous recevoir et présenter
vos œuvres.
Merci! |