Mot d'accueil de
Claude Rochet
Monsieur le 1er Adjoint,
Mesdames, Messieurs, chers amis,
Au nom des
membres de Peintres en Champagne, je tiens tout d'abord à remercier la ville
de Châlons pour son accueil dans cette galerie Clémangis et Monsieur Doucet,
1er adjoint, pour sa présence malgré un agenda très chargé. A ce propos, je
transmets les excuses de Monsieur Bourg-Broc, retenu par d'autres
engagements. Merci à nos visiteurs dont la présence régulière atteste un
attachement réciproque.
Au seuil printanier de notre première exposition de l'année, je vous suggère
de retenir les dates de nos deux autres expositions dans ce même lieu :
du 19 mai au 13 juin, présentation des peintures expressionnistes, alliant
force et sensibilité, de Frederic Weiss,
puis du 6 au 21 novembre, exposition des oeuvres de Alain Bonnefoit,
alchimiste des courbes et de la lumière, qui a dédié son art au portrait
féminin et qu'Hervé Bazin qualifiait de « peintre des Venus ».
Aujourd'hui, nous avons le plaisir d'accueillir Robert Le Guinio, breton
installé en Région parisienne, que Peintres en Champagne a déjà présenté au
public châlonnais en 1997. Ses œuvres ont fréquenté, depuis 1976, les
cimaises les plus réputées en France et à l'étranger où elles lui ont valu
de nombreuses distinctions; citons, entre autres salons : les Artistes
Français (où il fut distingué par une médaille d'argent), Réalités
nouvelles, Comparaisons; il est membre du comité de la Fondation Taylor.
On pourrait trouver un début d'explication à ce succès, dans l'étymologie de
son patronyme, surtout porté dans son département natal des Côtes d'Armor,
formé sur le vieux breton, signifiant « blanc, sacré, béni » ...
Mais c'est surtout la volonté et le talent qui ont guidé les pas de cet
autodidacte, berger à 8 ans, « monté » seul, très jeune, à la capitale pour
y travailler mais aussi s'ouvrir au monde du dessin qui le passionne déjà.
|
Il
s'investit beaucoup au Louvre où il se fait admettre comme copiste,
s'attelant à l'observation minutieuse des Maîtres de la peinture tels Le
Titien, Chardin, Millet, Corot, Sisley et Cézanne, forgeant les outils
nécessaires à une passion naissante, aujourd'hui encore intacte.
Progressant dans cette phase d'apprentissage tout en exerçant son activité
professionnelle, Robert Le Guinio donne corps, par ses aptitudes et sa
détermination, à ses divers projets ; sur le plan artistique, il se sent en
état d'aborder véritablement la création picturale; le style figuratif de
cette période s'adapte à une peinture essentiellement de paysage, rappelant
l'environnement de sa jeunesse bretonne. Parallèlement, une carrière de
décorateur dans un grand magasin parisien se dessine, si j'ose dire. Il y
sera responsable d'agencement et de décoration.
Peu à peu la représentation picturale figurative, ne suffit plus et doit
composer avec une expression mentale complétant de façon décisive
l'inspiration d'un peintre devenu abstrait.
Abstrait, mais avec le souvenir et la maîtrise d'une longue période de
peinture figurative qui continue de structurer et rythmer, consciemment ou
non, les œuvres à la façon de compositions musicales. Une émission télévisée
montrait justement hier, Pierre Boulez souligner, devant une œuvre de Paul
Klee, la parenté structurelle des espaces picturaux et musicaux. Robert, tu
as toi-même fait l'expérience d'un semblable témoignage de proximité entre
les deux expressions artistiques, lorsque le compositeur de musique
contemporaine, Roger Tessier, ancien élève d'Olivier Messiaen, a découvert
avec une rare émotion ton travail.
Notre peintre-musicien devenu abstrait, n'est plus limité à la partition de
la nature et de la réalité; excellent coloriste, il peut ainsi donner libre
cours à une inspiration créatrice, libre certes, mais guidée et soutenue par
les automatismes d'années de gammes et de solfège que fut son activité de
peintre figuratif; car, si j'ose dire, l'improvisation ça ne s'improvise
pas!
Par définition, ça ne s'apprivoise même pas; c'est dire si l'exercice
confine parfois au domptage, où s'affrontent et s'équilibrent le conscient
et l'inconscient, le rationnel et l'imaginaire, le partiel et le tout, le
souvenir et la projection. Dans l'orchestration de leur confrontation,
réside toute la difficulté mais aussi la richesse de l'entreprise. Synthèse
toujours à reprendre, tel le mythe de Sisyphe, entre le souvenir des
pâturages bretons du jeune berger et la prospective créatrice de l'éternel
passionné.
Mais,
comme s'exclamait René Char devant une œuvre de Dali : « Comment vivre sans
inconnu devant soi? »
Surtout à
la veille du printemps.
Robert, je
souhaite à cette exposition tout le succès que ton talent mérite.
|